Cosmétique de l'ennemi

Dès son premier roman Amélie Nothomb nous a habitués à des titres insolites ou étranges. Celui-ci surprend encore plus que les autres. Difficile de se faire une idée de ce qui se cache derrière la curieuse association de ces deux mots : cosmétique et ennemi. On se doute bien que la cosmétique en question n'est pas forcément celle que l'on imagine. La suite nous prouvera que l'on avait raison de se méfier. Quant à l'ennemi, ce ne sera certainement pas l'Autre, ce serait trop simple. Et les romans d'Amélie sont tout sauf simple. Celui-ci encore moins que les autres. Si on se contente de résumer l'histoire, certes, elle parait assez facile à raconter. Unité de lieu, un aéroport. Unité de temps, temps de l'attente qui incite à l'échange avec l'Inconnu. Deux personnages. Deux ? Pas si sûr. Ce n'est jamais aussi simple avec Amélie. Ce n'est pas parce qu'il y a dialogue qu'il y a deux protagonistes... Le personnage se confie à qui ? A quelqu'un d'autre ou à lui-même ? Et puis il y a l'omniprésence de celle qui n'est plus là mais qui est évoquée, convoquée même. Rien n'est jamais facile dans les romans d'Amélie Nothomb. On retrouve dans celui-là, comme dans les autres, le pire et le meilleur de nous-mêmes. L'affrontement perpétuel des antinomiques. Beauté suprême, amour absolu et jouissance démesurée, n'ont d'autre opposé ici que la mort. La brutale concision du récit nous fait toujours l'effet d'un couperet. Notre pauvre tête choit alors dans la panière de l'éternité où elle aura tout loisir de méditer et rechercher le passage du livre où elle a été piégée...