" Mourir ne sert à rien, ici tout le monde finit par mourir, chuchota-t-il. Mais les nazis vont perdre la guerre et ils ne pourront pas tous nous tuer. Ceux qui survivront auront le devoir de raconter les atrocités que nous avons subies. Tu dois rester vivant, et moi aussi je resterai vivant."
Vivant, peut-être...mais marqué non seulement d'un matricule mais d'une mémoire cruelle. Comment raconter lorsque les mots sont dérisoires, comment ne pas regretter d'être un survivant alors que tant d'autres sont partis, comment continuer ce métier de coiffeur avec cette main qui devait couper les nattes des cadavres de fillettes avant de les brûler dans les fours?
" A Auschwitz, il n'y avait qu'une seule couleur, murmura-t-il, celle de la cendre.
Le peintre le considéra avec émotion, puis lui dit avec douceur :
Chaque homme a le droit à une couleur, celle de sa liberté, il existe une infinie de couleurs pour chacun d'entre nous. Un jour, tu trouveras la tienne..."
Maurizio finit par refaire sa vie en Argentine, s'installe comme coiffeur coloriste. Le succès rapide lui vaudra de coiffer Evita Peron et de lui créer cette sublime teinte blonde. Plus tard, il s'occupera beaucoup de sa petite-fille qui a les cheveux blond cendré comme le premier amour de sa vie, Alba, cette jeune résistante communiste italienne arrêtée en même temps que lui . Lui parce qu'il est juif, elle pour ses activités avec la Bandiera rossa.
L'auteur alterne le récit de Maurizio depuis le début de la seconde guerre mondiale à sa vieillesse en Argentine avec celui de Flor, une femme qui parle à son amant. Le départ est assez confus et énigmatique puis quelques points communs comme la neige, la cendre et la force de l'amour créent les liens entre les deux histoires, celle d'un grand-père et de sa petite-fille.
Avec un sujet classique et rebattu sur les camps de concentration, l'auteur parvient alors à créer son point de vue. La force de l'amour, la tendresse, le calme, l'attachement à une passion (celle des couleurs et des cheveux) sont autant de points communs entre Maurizio et sa petite-fille qui se rejoignent dans la cendre. La voix de Flor exhorte à la vie malgré les drames, tout comme Johan, prisonnier des camps pouvait soutenir Maurizio.
Eric Paradisi a vécu cette perte dramatique d'un être aimé lors d'un incendie. Avec l'histoire de Flor et de Maurizio, il tente de montrer qu'au-delà des pires épreuves, des horreurs de la guerre ou de la vie, l'amour doit renaître dans les cendres, parce que chacun a droit à sa couleur.
Un roman touchant, tragique mais tourné vers la vie qui témoigne de l'Histoire et du drame personnel.
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