Raphaëlle Bacqué en un clin d’œil :
Raphaëlle Bacqué est journaliste au Monde depuis 1999 et est notamment l’auteur de plusieurs enquêtes et portraits parus chez Grasset dont Le dernier mort de Mitterrand.
Pourquoi on aime "Richie" :
Qu’est-ce qui pouvait bien faire marcher Richard Descoings ? On peine à le dire tant l’emblématique directeur de Sciences Po aura été tout au long de sa vie pétri de paradoxes : transparent à l’ENA, il sort, à la surprise générale, 10e de la promo Leonard de Vinci en 1985 ; haut fonctionnaire en costume-cravate assoiffé de pouvoir et de reconnaissance le jour, oiseau de nuits enivré d’alcool, de drogue et de sexe le soir ; homosexuel assumé, marié à une femme ; homme de gauche fasciné par Nicolas Sarkozy ; enfant perdu mais véritable rock-star auprès des élèves comme des sphères les plus influentes de l’Etat. Rarement un portrait journalistique aura autant pris la forme de la vie qu’il brosse. Vif, fulgurant, complexe, fascinant : tel est "Richie", l’homme comme le livre de Raphaëlle Bacqué.
La journaliste fait d’ailleurs preuve d’un vrai souffle littéraire dans ces pages d’enquête et d’hommage. Il y a du Genet et du Proust dans la façon dont elle raconte ses premiers pas dans la vie publique au Conseil d’Etat - où il rencontre son compagnon de trente ans Guillaume Pepy - mais surtout au sein d’AIDES aux côtés de Frédéric Edelmann et Daniel Defert entre autres. A cette époque, malgré la menace du Sida qui touche plus d’un de ses amis, Richie continue à fréquenter les backrooms, arrive parfois très en retard aux réunions du Conseil sans même avoir pris une douche. Des habitudes éreintantes qu’il n’abandonne pas une fois nommé directeur d’une des plus prestigieuses écoles parisiennes à seulement 38 ans. Là, il ne tarde pas à acquérir un statut d’idole qui le conduira à sa perte : partagé entre sa soif du pouvoir et son vrai souci des élèves, il s’essouffle dans la course aux réformes, draguant les universités américaines pour calquer son cursus sur elles et faire de Sciences Po Paris le "Harvard à la française", ouvrant l’institution aux ZEP – son grand fait d’armes en 2001 – , traînant ses promos dans les bars de nuit où il danse parfois torse nu et ivre mort sur les tables, se compromettant dans des scandales de fric notamment parce qu’on le taxe de favoriser Nadia Marik, son épouse dont il a fait sa numéro 2, mesurant sa popularité à l’aune des likes et des flirts sur son profil Facebook comme un adolescent.
Toujours déjà essoufflé de vouloir être aimé, Richie sera retrouvé nu sans vie sur son lit dans une chambre d’hôtel new yorkaise le 3 avril 2012. Le mystère qui enveloppe ses dernières heures persiste : il aura probablement reçu deux escort-boys avant que son cœur ne lâche dans son sommeil. Epuisé, l’ange Richie aura fait le grand saut.
La page à corner :
"En 2000, pour célébrer l’internationalisation de l’école, Richard décide un spectaculaire voyage à Londres afin de célébrer la « diplomation » de la première promotion du XXIe siècle. Dans les dîners de la rue Godot-de-Mauroy, on s’épate de le voir si entreprenant et si ambitieux. Mais on l’aide, chaque fois qu’on peut. Guillaume Pepy et son second, David Azéma, à la tête d’Eurostar, ont réservé plusieurs wagons dans un train et le directeur est parti avec 400 étudiants, un après-midi du mois de juin, vers l’Angleterre. Védrine, encore lui, a demandé à son homologue Robin Cook de recevoir toute la troupe au Foreign Office. Le soir, le directeur de Sciences Po a fait louer une discothèque. « Le deal est simple : nous ne paierons pas de nuit d’hôtel, a-t-il annoncé triomphalement aux nouveaux diplômés. Les couche-tôt se débrouilleront de leur côté, les autres danseront toute la nuit jusqu’au train du lendemain. » Evidemment, il est des « autres ». Après le dîner, Richard arrive jusqu’à la boîte, entouré de centaines de jeunes gens. Il a troqué son costume de directeur pour un pantalon de cuir, un tee-shirt et un gilet sans manches, très « années Palace ». Musique, alcool, fête, il est dans son élément. Ses deux vies enfin rassemblées, il danse toute la nuit, excité, ivre et heureux au milieu de ses étudiants". (p.123)
"Richie" dans la presse :
"L’auteur tisse avec élégance tous les fils qui ont fait de « Richie », un homme si complexe et surtout le seul vrai rénovateur de l’enseignement supérieur depuis des lustres", Sabine Delanglade, Les Echos.
"Grâce à un travail d’enquête exigeant et à une écriture vive et ciselée, Raphaëlle Bacqué rend ce portrait passionnant", Caroline Bonacossa, Le Parisien.
"Raphaëlle Bacqué montre le vrai visage de notre classe dirigeante : condescendante, connivente, indécente… et corruptible", Gilles Martin-Chauffier, Paris-Match.
"Son portrait est aussi celui d’une modernité. Beaucoup d’argent, beaucoup d’image. La journaliste le rend à lui-même dans un roman vrai sur les marches du pouvoir", Marie-Laure Delorme, Le JDD.
Noémie Sudre