Delphine Saubaber EN UN CLIN D'OEIL :
Delphine Saubaber a été grand reporter à L'Express. Lauréate du Prix Albert Londres 2010, elle est l'auteure du très remarqué Vies de mafia (Stock), co-écrit avec Henri Haget. Avec La fille de la grêle, elle signe son premier roman.
POURQUOI ON AIME La fille de la grêle :
Au crépuscule de sa vie, Marie entreprend d'écrire à sa fille Adèle. Elle lui livre l'histoire de sa propre enfance, qu'elle a toujours tue. Avec une extraordinaire force poétique, elle nous emmène à la rencontre de ses parents Joseph et Madeleine, qui mènent une vie de labeur à la ferme des Glycines, et de son frère Jean, né différent. Ce dernier ne parle pas, n'entend pas. Alors quand la grêle s'abat sur la ferme familiale, c'est toute la hargne du père qui s'échappe.
En revenant sur les traces de son enfance, Marie raconte aussi la grande vieillesse et la culpabilité. Merveilleux roman de transmission d'une mère à sa fille, La fille de la grêle rend aussi un vibrant hommage à la nature, à jamais toute-puissante.
LA PAGE À CORNER :
Voici cette petite fille, Adèle, cette petite fille à la fois rêveuse et cruelle que je redeviens chaque jour, chaque heure qui me rapproche de la fin. Vois cette femme toute nue, tremblant sur ses jambes, qui te confie avec tant d'amour ce qu'elle fut, tapie au fond d'elle-même. Cette mère qui, sentant sa vie lui glisser des mains, remonte son fleuve pour retrouver sa source, saute de vieillesse en enfance et inversement. Le sait-on assez que la vieillesse, cet état de dépendance, est une réminiscence de l'enfance sans l'horizon ?
Je ne suis plus qu'une enfant qui pleure en secret la nuit sur son oreiller en revoyant les yeux exorbités de son père. Et cherche partout son petit frère.
En grandissant, j'ai voulu m'échapper de mon enclos, me projeter loin de cette famille, j'ai fait des études pour devenir une intellectuelle c'est-à-dire une révoltée, pour quitter le vieux monde et entrer dans le nouveau avec le frisson méprisant d'arpenter une propriété inconnue, dénigrant désormais toute forme de suprématie sociale qui ne serait pas celle du diplôme. J'ai moi aussi voulu rire aux éclats, me moquer, me couler dans le nombre, jouer à être celle que ma voix murmurée donnait à voir. Mais au fond de moi, je suis toujours restée cette petite fille de la grêle aux sabots trop grands, la sauvage consumée dans sa nuit noire qui n'est jamais parvenue à s'insérer ni à aimer vraiment qui que ce soit. (p. 123-124)
DANS LA PRESSE :
Une confession émouvante et la transmission d'un savoir, peut-être d'un monde révolu.
Sud Ouest
Shannon Humbert.