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02 Septembre 2014

Charles Frazier : Deux enfants contre une poignée de dollars

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Charles Frazier : Deux enfants contre une poignée de dollars

L’auteur des grands espaces américains Charles Frazier signe avec A l’orée de la nuit (Grasset), une fresque dramatique relevant à la fois du roman noir, du western et de la tragédie.

Charles Frazier en un clin d’œil :

 

Charles Frazier est un romancier américain lauréat du National Book Award pour son premier roman Retour à Cold Mountain (Calmann-Lévy). A l’orée de la nuit est son troisième ouvrage. Lire la biographie de Charles Frazier.


Pourquoi on aime "A l'orée de la nuit" :

 

A l'orée de la nuit convoque bien des références. A la fois l’âge d’or du western pour le décor, ce coin reculé des Appalaches où l’on s’attendrait à croiser des Indiens s’il n’y avaient plusieurs indices rappelant que nous sommes dans les années 60 ; mais aussi la série culte Twin Peaks pour le lac, la forêt, le rade où l’on boit des rhums-Coca dans un box et le souvenir d’une ancienne pom-pom girl ; le film noir à la Hitchcock pour l’angoisse sourde, les bagnoles qui tournent, les personnages ambigus dont certains rôdent et d’autres fuient. Mais la citation la plus flagrante est sans conteste La Nuit du chasseur, unique film et chef-d’œuvre de Charles Laughton avec Robert Mitchum en faux pasteur à la poursuite de deux gamins, ignorants gardiens d’un butin caché.

 


Car sous la plume noire et poétique de Charles Frazier, il y a également deux jeunes enfants, Dolores et Frank, des jumeaux sublimes et terribles, mutiques et angoissants, porteurs d’une violence primaire et d'un lourd secret, enclins à la pyromanie et auxquels on imagine des yeux insondables de chat. Il y a Luce, jeune femme farouche gardienne d’un cottage au bord d’un lac qui hérite des gosses après que leur mère, sa soeur, a succombé sous les coups de sa raclure de mari. Il y a Bud, la brute en question, prêt à pas mal de sales coups pour récupérer son magot disparu. Il y a Lit, sympathique shérif qui se fait du truand un dangereux copain. Il y a Stubblefield, joli cœur dont la sérénade chantée à Luce vient encore retarder les péripéties et le dénouement dans un suspens des plus intenses.

 


Avec ce troisième roman, Charles Frazier démontre encore une fois son immense talent d’écrivain des grands espaces américains tout en dévoilant sa capacité à nous faire frissonner et à créer des personnages complexes, l’un des attraits principaux du roman étant la présence quasi fantastique des mystérieux jumeaux nimbant le récit d’un halo quasi surnaturel.

 

La page à corner :

 

L’une des grandes sources d’intensité du roman réside dans la relation de Luce aux si étranges jumeaux : "Luce ne s’attendait pas à aimer les enfants et elle ne s’attendait certes pas à ce qu’ils l’aiment un jour. C’était beaucoup trop demander, dans un sens comme dans l’autre. Elle ressentait néanmoins quelque chose pour eux, sans doute en liaison avec leur survie. Méprisés et blessés, ils l’étaient sûrement. Ils avaient survécu à une intrusion catastrophique. Ils n’étaient pourtant pas devenus des enfants difficiles et apeurés. Dès que l’envie les prenait, ils se transformaient en redoutables petits sauvages. La plupart du temps, ils n’avaient strictement rien à foutre de votre monde et ils supportaient la douleur sans broncher, la leur comme la vôtre, aussi stoïques que des Apaches. Et dès qu’ils en avaient l’occasion, ils se vengeaient contre la réalité qui les incluait. Ils grattaient une allumette, marquaient un point, prenaient leur revanche. Certains jours ils semblaient aussi harassés et moribonds que le vieux Geronimo photographié durant ses dernières années, le visage inexpressif mais aux aguets derrière leurs petits yeux au regard perçant. Quel que soit le sentiment que Luce commençait à ressentir envers Dolores et Frank, elle n’en connaissait toujours pas le nom. Mais il se situait dans les parages du respect" (p. 228).

 

"A l’orée de la nuit"dans la presse :

 

(Charles Frazier joue simultanément) "les cartes du suspens, de la poésie noire et de la musicalité la plus lumineuse", Bruno Juffin, Les Inrocks.

 



Noémie Sudre

Retour à Cold Mountain
Dans les derniers temps de la guerre de Sécession, un homme traverse l’immense espace américain. Il s’appelle Inman. Soldat sudiste, blessé à la bataille de Petersburg, il a déserté dans l’espoir de retrouver sa région natale, la Caroline- du-Nord, où l’attend Ada, la femme...
Paru le : 
04 Octobre 2000

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