Hachette.fr : Quel est votre parcours personnel et comment en êtes-vous venue à écrire Les Suppliciées du Rhône ?
Coline Gatel : J’ai toujours écrit. Autant que je me souvienne, j’ai toujours inventé des histoires. Je les dessinais avant même de savoir écrire. Mais comme je ressentais une importante soif de tout découvrir, je n’ai jamais pu me résoudre à ne faire que ça. J’ai donc joué les "touche-à-tout" pour mon plus grand bonheur. On a qu’une vie ! C’est le développement du numérique qui m’a ramenée au monde du livre, me poussant à ressortir mes histoires enfouies. Je suis ainsi devenue une adepte de l’autoédition. Les Suppliciées du Rhône est mon premier roman publié.
Comment avez-vous eu connaissance du Prix "À la recherche des talents de demain" ? Avez- vous écrit spécialement le roman dans le cadre du concours ?
J’ai découvert ce prix sur Facebook par le biais de mes amis. J’avais ce manuscrit dans mon tiroir, je me suis dit "pourquoi pas ?", avec la conviction que je ne gagnerai pas, car je ne gagne jamais rien... D’ailleurs, pour l’anecdote, je n’y croyais tellement pas que j’avais créé mon profil sans joindre mon texte. Kobo m’a heureusement relancée le jour de la clôture des envois. En fait, avec le recul, je pense que ce prix était vraiment fait pour moi !
Qui était Alexandre Lacassagne et pourquoi avez-vous décidé d’en faire un personnage du roman ?
Alexandre Lacassagne était professeur à la faculté de médecine de Lyon. Mais si je me suis intéressée à lui, c’est surtout parce qu’il est l’un des fondateurs de l’anthropologie criminelle. De plus, il véhiculait l’image de quelqu’un de sympathique, bon vivant mais aussi facétieux. On s’attache très vite au personnage lorsqu’on entreprend des recherches sur lui. Pour équilibrer le côté "à fleur de peau" de mes autres personnages, et notamment de Félicien Perrier, j’avais besoin d’une figure paternelle qui rassure.
On peut résumer le roman à une adaptation des Experts à Lyon en 1897... Quels sont les ingrédients de cette intrigue ?
Pour faire ma petite cuisine des mots, j’ai mis en place :
- Une "figure de proue" sous les traits de Lacassagne. Le protagoniste qui stabilise l’histoire.
- Des électrons libres : Félicien, Irina et Bernard, avec des passés lourds, mais des capacités particulières. J’aime créer des héros qui portent des blessures. J’ai besoin que mes lecteurs ressentent des émotions fortes.
- Un lieu bien spécial et inquiétant : un bateau-morgue menaçant de s’échouer.
- Une ville bourgeoise, un peu figée, mais rattrappée par le XXe siècle qui pointe.
- Et une série de crimes, bien entendu, sans quoi un thriller policier n’en serait pas un.
Pourquoi avez-vous choisi Lyon comme décor et quel rôle la ville joue-t-elle dans l’intrigue ?
Lacassagne enseignait à Lyon. De plus, je trouve cette ville très belle, avec sa colline qui travaille (La Croix-Rousse) et sa colline qui prie (Fourvière), son méandre de traboules qui transforme cette cité en un vaste labyrinthe et la présence importante de l’eau.
Vous êtes-vous directement inspirée de faits réels, d’enquêtes, de livres, de films ou de séries ? Avez-vous vous-même mené des enquêtes pour écrire ce livre ?
J’ai fait énormément de recherches. Coller à ce qui a existé est toujours impossible et un roman reste un roman, fort heureusement. Mais c’était important pour moi de transcrire une forme de réalité, dont celle du bateau-morgue, lieu intrigant par le mystère qui l’entoure. Quelques personnages sont eux aussi bien réels mais ils évoluent au milieu de tout un monde sorti tout droit de mon imagination.
Quels sont vos auteurs d’influence ?
J’ai lu et je lis toujours (sauf lorsque j’écris) beaucoup. De tout. Tout dépend de mon humeur du moment. Auteurs classiques, thrillers, ou même cozy mysteries… J’ai été bousculée très jeune par La petite fille au bout du chemin de Laird Koenig et par La Maison sur le rivage de Daphne du Maurier. Je suis aussi, depuis mes 12 ans, une fan incontestée d’Arsène Lupin. C’est peut-être de lui, d’ailleurs, que je tiens ce goût du "chevaleresque" jusque dans le meurtre.
Après avoir reçu le prix, votre roman est paru au format numérique plusieurs mois avant sa parution au format papier. Qu’apporte selon vous la lecture numérique et quel sens cela a pour vous que votre roman soit publié sous ce format en exclusivité ?
Pendant longtemps, le numérique ne m’a pas paru important. Et puis, j’ai découvert les liseuses, et pour moi qui voyage pas mal, je dois reconnaître que c’est très rassurant d’avoir des dizaines de titres, bien au chaud en attente ! Certes, cela ne m’empêche pas de d'avoir des livres papier de crainte, peut-être, d’être en manque ! Selon moi, la lecture numérique, plus interactive que sa consoeur "papier", peut amener certaines personnes éloignées du monde du livre à lire plus facilement. L’écran étant devenu habituel dès le plus jeune âge, lire de cette manière peut s’avérer plus simple pour les nouvelles générations. Bénéficier d’une publication numérique, c’est donner à mon livre une plus grande visibilité en le mettant à la portée de tous.
Propos recueillis par Noémie Sudre