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29 Mai 2019

"Notre-Dame de l'humanité" : Adrien Goetz revient sur l'incendie de la cathédrale dans un essai mêlant histoire de l'art et réflexion sur notre patrimoine

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Quelques semaines après l'incendie et la destruction partielle de Notre-Dame de Paris, Adrien Goetz revient sur ce drame qui dépasse les considérations d'ordre religieux ainsi que les frontières françaises dans Notre-Dame de l'humanité (Grasset) un essai au titre évocateur mêlant histoire de l'art et réflexion sur notre patrimoine.

Lorsqu'Adrien Goetz, historien de l'art et membre de l'Académie des beaux-arts, apprend, le 15 avril 2019, que Notre-Dame de Paris est en proie aux flammes, il a le même réflexe que bon nombre de Parisiens : il se rend sur place, pour voir ce spectacle de ses propres yeux. Devant le rassemblement de tant de personnes, il réalise très vite que le monument échappe à sa seule identité française et religieuse : ce brasier n'est pas seulement Notre-Dame de Paris, c'est Notre-Dame de l'humanité. 

 

Un spectacle aussi effroyable qu'"instagrammable"
 

Adrien Goetz doit bien l'admettre : il fait partie des nombreuses personnes sur qui la vision la cathédrale en feu a exercé une véritable fascination. Spectacle aussi épouvantable qu'"instagrammable", l'incendie prend des allures d'un tableau de William Turner. Tout le monde semble pris d'une incroyable obsession pour photographier, filmer - en un mot pour voir Notre-Dame de Paris brûler. Aux yeux de l'académicien, ce n'est pas seulement une oeuvre, un monument, qui est en danger : c'est l'art lui-même. Ce qui unit tous ces hommes et femmes, ce jour-là, c'est l'art. Et dans les jours qui suivent, au travers des nombreux débats sur la restauration de la toiture et de la flèche de la cathédrale, c'est encore une fois l'art qui est en jeu ou plus précisément c'est la question de sa préservation qui est posée.
 

"Victor Hugo a restauré l'âme de la cathédrale pour en faire celle du peuple"

 

Dans son essai intitulé Notre-Dame de l'humanité (Grasset) tout juste paru chez Grasset, c'est donc très naturellement qu'Adrien Goetz s'attarde sur l'image qu'a représentée la cathédrale au fil des siècles. Délaissée pendant un long moment, elle a traversé le temps grâce notamment à une prise de conscience patrimoniale insufflée par Victor Hugo. Plus tard, elle est agrémentée d'une flèche imaginée par Viollet-le-Duc et s'arrache totalement, au XXe siècle, à son but strictement religieux en devenant le lieu de nombreux hommages rendus aux écrivains qui meurent. C'est par la vision qu'on s'en fait, par sa représentation physique, que Notre-Dame a toujours vécu. Mais cette image devient aussi sa faiblesse : à force de la voir comme un élément immuable du paysage français, on a fini par en oublier l'existence charnelle, la fragilité. 

 

Notre-Dame de Paris, aujourd'hui et demain

 

Au lendemain de l'incendie, Notre-Dame de Paris est une cathédrale défigurée, un nouveau Quasimodo. A l'instar de celui qui l'habitait dans le roman de Victor Hugo, elle est désormais dotée d'une certaine difformité qui aimante les yeux, pourrait-on dire. Une fois les flammes taries par le formidable travail des pompiers, tout le monde s'accorde à penser qu'il est impossible de laisser ce monument dans un pareil état. De nombreux débats prennent immédiatement place, et différents points de vue se confrontent : faut-il, lors de la reconstruction, rester fidèle à la cathédrale telle que nous la connaissions ? Ou est-ce l'occasion de recourir à de nouvelles technologies, de laisser place à une nouvelle architecture ?
 

Ouvrir des débats littéralement constructifs

 

Loin de se prononcer de façon ferme et radicale à ce sujet, Adrien Goetz nous invite plutôt à prendre du recul face à ces débats. Pour ce faire, et parce que l'on a tendance à les oublier, il revient sur tous les changements architecturaux qu'a pu subir Notre-Dame de Paris au cours de son existence. Mais avant tout, l'historien de l'art nous invite à faire perdurer le rassemblement premier qu'a produit l'incendie. Il appelle donc à ce que les débats soient eux aussi constructifs, et que la reconstruction de la cathédrale soit avant toute chose un hymne à l'union - pour que Notre-Dame de Paris demeure toujours Notre-Dame de l'humanité. 

Shannon Humbert

 

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